Les Communes du Bénin à la quête d’une autonomie…
Les séances d’échanges avec les acteurs sur le développement économique et local ont eu l’avantage de réunir les forces vives de chaque commune dans une salle. Rares moments de vérités entre élus communaux, cadres des mairies, opérateurs économiques, Osc, et coopératives de femmes , qui ont abouti à des résolutions fortes.
Il est 15h 03 mn. Dans la petite salle de conférence qui abrite les réflexions sur la valorisation des potentialités de Zangnanado, ce mercredi 16 février 2023, l’heure est à l’élaboration de la feuille de route devant servir de guide aux actions futures sur le développement économique dans la commune. Tout à coup, une voix s’élève au-dessus de la mêlée. « Ce que vous dites ne reflète pas vraiment la vérité. Nous, femmes, transformatrices de arachides, avons notre stratégie pour écouler nos produits. Quand je prends mon cas, j’ai des clients qui viennent d’un partout pour faire des commandes. Par exemple, le week-end dernier, j’ai des clients qui sont venus du Nigéria à qui j’ai livré six bassines de kluiklui (galette à base d’arachide). Donc, quand vous dites que personne ne connait pas notre savoir-faire, vous n’êtes pas dans la vérité ». C’est la voix de Philomène Goudjo, transformatrice d’arachide en produits dérivés. Dans le brouhaha né du besoin de la vingtaine de participants invités à la séance d’échange avec les acteurs sur le développement économique et local (DEL) d’opiner sur la question de l’identité des produits made in Zangnanado, le ton attire l’attention et impose le silence. Sexagénaire, cette femme, très calme depuis le démarrage des travaux ose s’imposer lorsqu’il a été question de l’activité qui nourrit sa famille. « La dernière fois, lors de l’identification géographique des produits commerciaux identitaire de chaque commune, l’Etat central a choisi à Zangnanado le Agonlinmi (huile d’arachide) …» continue Madame GOUDJO.
Au bout de quelques minutes, Rodrigue de-Souza, Responsable du développement Local et de la Planification de la commune recadre le sujet. « Ce dont il est question aujourd’hui, c’est de savoir comment faire pour que le consommateur final puisse identifier les produits de Zangnanado sur n’importe qu’elle marché. Quand nous prenons le Kluiklui par exemple, nous pouvons le trouver dans tout le plateau d’Agonli. Mais comment nous faisons pour que le consommateur sache que celui-ci est fabriqué chez nous ? ». Après plusieurs minutes de discussions, les participants ont insisté pour inscrire au nombre des priorités devant figurer sur la feuille de route la résolution de créer et d’héberger un site web pour une visibilité des potentialités de la commune, d’instaurer des actions de promotion des plats/mets locaux lors des activités de l’administration Communale.
Si à Zangnanado, la solution est la création d’un site internet dédié à la promotion des délices locales, à Ouinhi, elle passe par la prise d’un arrêté communal pour la promotion des mets locaux. A partir du 31 mars 2023, les plats locaux (Agonmita, riz, gari etc.) seront automatiquement proposés aux participants lors de tous les ateliers organisés par la mairie. Une décision que le maire juge utile pour convaincre les opérateurs privés, qui sont visiblement sont encore un peu dubitatif quant aux bonnes résolutions des leurs élus.
« Mais si on ne peut pas avoir accès aux potentialités de notre commune, comment pourront-nous développer nos activités et participer au social ? »
Sortis de la salle de conférence pour répondre à un appel, Patrick Djossa, propriétaire de plusieurs restaurants à Ouinhi se plaint. « Aujourd’hui, une bonne partie des marchés sont passés avec les opérateurs externes au détriment de nous, qui sommes de la commune. Mais si on ne peut pas avoir accès aux potentialités de notre commune, comment pourront-nous développer nos activités et participer au social ? En plus, il y a cette tendance à politiser beaucoup d’initiatives » narre l’opérateur économique. Visiblement, il attend un peu plus que des mots pour croire à la concrétisation des propos qui, pour lui sonnent encore comme une promesse.
A croire que le vent à emporter le murmure de son administré à ses oreilles, Jonas Babatoundé Houessou, maire de la commune de Ouinhi se lève de son siège, sors de la salle de conférence. Il discute un instant avec ses collaborateurs et reviens s’assoir. Une trentaine de minutes plus tard, débarque dans la salle deux assiettes de Agonmita, une galette sous forme de boulette fabriquée à base de cocos râpés. Au-delà d’une dégustation improvisée, elle a permis de lever quelques doutes. « Depuis plusieurs mois, j’invite systématiquement les femmes de l’association des productrices de produits dérivés du manioc aux ateliers que nous organisons. Je leur demande de venir exposer leurs produits » a expliqué l’autorité communale.
Pour confirmer les propos du Maire, Elisabeth Akpéyéko, représentante de la coopérative des femmes transformatrice de Ouinhi sors d’un sac en rafia soigneusement disposé sous son siège les propositions de son association. Un mélange de gari, de sucre et de lait dans un même paquet, connu dans la localité sous le nom de « gari amélioré ». Une série d’évènements qui permettent à Abdoulassidou Arouna, secrétaire exécutif de la mairie de Ouinhi de renchérir : « ici à Ouinhi, nous avons compris que le développement local repose aussi sur la valorisation des potentialités du milieu. Nous sommes une commune qui refuse la fatalité et tente de rechercher collectivement ou mettre en œuvre des initiatives d’auto promotion de développement de leur territoire ».