Lavenir BOKO, expert en développement local au sujet du bien-fondé des versions citoyennes des budgets communaux
« C’est un outil qui va aider les décideurs à revoir leur position »
L’étape de la vulgarisation des versions citoyennes des budgets communaux a démarré. Dans les 20 communes retenues pour cette phase pilotes, les plaquettes et les bâches sont affichées sur les places publiques afin de permettre aux populations d’accéder à la bonne information. Revenant sur le bien-fondé de cette initiative prise par le Programme PartiCiP au DEL, financé par l’Ambassade du Royaume des Pays-Bas avec la contribution de la Giz et de la Coopération, Lavenir BOKO, expert en développement local estime que cet outil va aider les décideurs à revoir leur position par rapport au budget. Il a aussi, dans cet entretien reconnu qu’il est un tremplin pour les populations dans la mesure où elles pourront comprendre les initiatives en cours dans leur commune et y participer activement.
Vous avez entamé depuis peu la vulgarisation de la version simplifiée du budget des communes. Qu’est ce que la dame qui est devant sa marchandise au marché ou le monsieur qui est dans son champs peut comprendre par-là ?
La version citoyenne du budget communale c’est la version simplifiée du gros document de budget qui est élaboré à la mairie et la version simplifiée c’est-à-dire la version qui permet à tout citoyen de comprendre au moins un peu qu’est ce qui à l’intérieur d’un budget. Quand on parle d’un budget qu’est-ce qu’on peut y voir ? L’objectif ici c’est de permettre véritablement à la population de comprendre le contenu. En d’autres termes quand on dit un budget il y a nécessairement dans la partie recettes, l’argent qui doit entrer et l’argent qui doit sortir ; les investissements quand on veut réaliser tout ce qui va être fait dans la commune. Les dépenses permettent également de ressortir tout ce qui est investissement prévu au titre de l’année.
Présenter comme ça, il y a une question qui vient tout de suite : pourquoi avoir senti le besoin de simplifier le budget des communes ?
Le budget se fait chaque année parce qu’il faut savoir là où l’on veut aller, savoir d’où on est parti et là où l’on va. Chaque année, la mairie est obligée de faire son budget et c’est une obligation aussi pour la mairie de faire connaître ce budget pour que la population puisse s’intéresser davantage à ce qui se passe à la mairie ; un peu comme quand nous prenons le plan de développement communal, quand on va voir les communautés, on va rencontrer les habitants, on prend des projets que nous voulons réaliser, chaque année, il faut un budget pour dire ce qu’on va faire des projets qui ont été rédigés entre temps sur le plan de développement communal. Le budget est donc un outil pour mettre en œuvre aussi le plan développement communal.
Vous avez commencé à l’aborder un peu, mais expliquez-nous un peu le contenu de cette version citoyenne du budget citoyenne que vous proposez à 20 communes pour cette phase pilote.
Si nous prenons le contenu, même dans la forme simplifiée, nous avons fait tout possible pour ressortir des informations qui sont vraiment capitales, des informations qui doivent intéresser tout citoyens, et quand vous prenons le produit final, vous allez voir la partie qui montre les recettes, la partie qui montre les dépenses. Mais il y a un aspect sur lequel nous avons plus mis l’accent : ce sont les services sociaux de base qui intéressent vraiment la population. Quand je dis services sociaux de base, il s’agit par exemple de l’eau et de l’assainissement, des infrastructures routières, les écoles, la santé. Le budget : dit voilà ce que nous avons faire par rapport à la santé cette année. C’est-à-dire : est- ce qu’on va construire un centre de santé ou bien est ce qu’on va aider les centres de santé à avoir les moyens pour que lorsque nos femmes vont accoucher qu’il n’y ait pas un problème de table. Concernant les écoles, la mairie doit tout le temps fournir des infrastructures comme les meubles et autres. Il faut construire aussi les bâtiments pour les écoles. Nous n’oublions pas les marchés, qu’est ce nous prévoyons faire pour nos marchés pour que quand nous les intégrons qu’on sente vraiment que ce sont des marchés dignes de ce nom-là ? Elles sont toutes des informations qui sont sur la version citoyenne. Donc tout cela est mis dans le budget et la version citoyenne ressort ces grands secteurs qui sont vraiment très importants pour les populations.
En qualité d’outil de décision et de stratégie, tel que vous l’expliquez, le travail que vous faites est suffisamment important pour ne concerner que les populations. Il doit concerner aussi les autorités communales. Donc à ce propos, de ce côté qu’en est-il ?
Quand nous observons aussi bien au Nord qu’au Sud, les 20 communes dans lesquelles nous sommes en train de faire ce travail, nous remarquons que c’est un outil qui va aider les décideurs à revoir un peu leur position par rapport à l’élaboration du budget. L’un des exercices que nous faisons est de faire ressortir la part du budget consacré à chaque secteur. Parce qu’on a dit que c’est tel nombre de millions est attribué à tel secteur, on pense qu’on n’a déjà beaucoup mis alors qu’il suffit de faire le point pour voir sur le budget global combien ça fait en termes de pourcentage. On finit par remarquer que ce dernier est minime. C’est la première grande remarque que nous avons sur les budgets. On voit que, par exemple, ce secteur qui intéresse aussi bien les autorités que les populations.
Le risque dans le travail que vous faites est de révéler des aspects des budgets communaux qui ne vont pas forcément plaire. Comment les autorités communales accueillent tout cela ?
Ce qui m’enchante est que les autorités apprécient déjà et ont décidé de réfléchir autrement pour voir comment améliorer, ajouter si possible, la part du budget alloués aux secteurs qui engagent plus de population qui besoin d’être satisfaite par rapport à tel ou tel secteur. L’autre chose est que nous avons essayé d’avoir presque les mêmes secteurs pour que cela pour avoir des points de comparaison.
De plus, nous avons mis l’accent sur certains volets parce que la société civile à travers l’Ong Alcrer, Social-Watch Bénin, Vng International et les partenaires que sont : l’Ambassade du Royaume des Pays-Bas, la GIZ et la Coopération Suisse ont souhaité que nous mettions beaucoup plus l’accent sur le volet social. Qu’on le veuille ou non, nos populations ont de grands besoins et si la mairie ne vient pas en appui, ces populations resterons toujours dans la précarité. C’est pour cela que pour le moment les marchés sont abordés. Mais la prochaine fois on verra encore comment mettre l’accent sur d’autres volets économiques.
Et pourquoi avoir miser sur le social à un moment où on travaille beaucoup sur la valorisation des potentialités économiques des communes ?
Si nous prenons le secteur social, nous savons qu’en termes de productivité ou de rentabilité on recherche celle qui facilite la tâche à tout le monde. Si les gens sont en bonne santé, c’est de la rentabilité économique ; ce n’est pas l’argent que l’on recherche directement.
« Si vous observez bien justement c’est ce que nous avons ressorti particulièrement dans ce budget, est ce qui tient compte véritablement des populations. Ce n’est pas tout parce qu’on ne peut pas tout ressortir maintenant. Mais quand on parle de santé cela concerne tout le monde. De même pour l’éducation qui est une affaire de tout le monde. Quand on parle des infrastructures routières, même si au niveau agricole ils ont pu récolter assez de produits, ceux-ci pour être transporter ils doivent forcément emprunter des routes. Pour cela il est prévu que ce volet soit reprofilé pour que les populations aient des voies en bonne état. Tout ce qui est prévu va dans l’avantage des populations.
Pour finir, il ressort de vos explications que vous faites le nécessaire pour que les populations comprennent ce qui se passe dans leur commune. Mais n’ont-elles pas en retour une responsabilité dans tout ça ?
Nous ne donnons pas des informations politiques mais plutôt sociales qui permettent à la population de comprendre que nous sommes de cœur avec eux. Et cela doit normalement les encourager à participer au développement en étant à jour vis-à-vis du fisc et bien d’autres. Il y a un dicton qui dit : « comptons d’abord sur nos propres forces » ; les partenaires peuvent venir mais si sommes informés, tout en sachant bien ce qui est fait à la mairie, nous nous sentons plus à l’aise de participer. La démarche des mairies est informer les populations. Si ma population sait ce que je fais, elle va plus m’accompagner. Si quelqu’un a besoin d’avoir plus d’information il ne s’agit plus de bouder dans son coin, mais se rapprocher de la commune. Le budget est là disponible, sur place il peut bien regarder et il aura les informations dont il a besoin. Ce qui reste à faire, est que la population reste curieuse pour demander chaque année qu’en dehors du gros document que nous ayons toujours une seconde version simplifiée qui permet à tous de voir ce qui est à l’intérieur du budget.

